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Canal du Midi à pied : le bilan

le canal du midi près de toulouse

On rembobine

Au printemps 2016, fraîchement célibataire et lassée de ma navigation d’un petit boulot à un autre, j’ai décidé de m’accorder une dizaine de jours pour moi. Rien que pour moi.

Avec quelques amis, nous avions prévu de nous retrouver à Sète fin juillet pour quelques jours de vacances dans l’Île Singulière.

C’est alors qu’une idée a germé dans mon esprit : et si j’y allais à pied ? Quand j’en ai parlé autour de moi, on m’a immédiatement prise pour une dingue, comme je l’ai raconté dans un premier article. Quoi ? Parcourir la distance qui sépare Toulouse de Sète en 10 jours de marche, alors que le trajet en voiture ne prend qu’un peu plus de deux heures ?

Contre toute attente (j’ironise) mon esprit de contradiction a pris le dessus (LOL) et bien évidemment j’ai entrepris de marcher de Toulouse à Sète, en suivant le chemin de halage qui longe le canal du Midi. 240 kilomètres de voie d’eau, plus des dizaines de bornes additionnelles pour les nombreux détours qui s’annonçaient déjà.

 

La marche comme révélation ?

Lorsque j’ai annoncé que je partais marcher le long du canal du Midi, beaucoup de randonneurs aguerris, notamment des personnes ayant fait les chemins de Compostelle, m’ont raconté comment leur marche avait changé leur vie, et engendré de véritables révélations sur eux-mêmes.

Je ne vais pas laisser le suspens planer plus longtemps : non, je n’ai pas été frappée par une révélation surgie de nulle part, je n’ai pas remis mon existence en cause ni décidé de changer de vie du jour au lendemain, je n’ai pas tout plaqué pour partir à la découverte du vrai moi dans une bergerie au fin fond des Hautes Pyrénées.

Par contre, le hasard du calendrier a voulu qu’un changement fasse son apparition dans mon train-train quotidien : juste avant de partir, j’ai appris que j’étais acceptée dans une formation diplômante. Ma nouvelle vie commencerait quelques mois plus tard, sur les bancs de la fac, pour une année de retour à l’école, 35 h par semaine !

À défaut de grande révélation, voici ce que j’ai ressenti tout au long de ce périple de près de 300 km : tout d’abord, un grand sentiment de liberté. Et j’ai compris ce que signifiait l’expression avoir le cœur léger.

Ce sentiment de légèreté m’a accompagné jour après jour. Le bagage mince. Des journées passées au grand air. Aucune contrainte matérielle. Le bonheur !

Je crois que dans nos vies, parfois un peu trop connectées et à cent à l’heure, on ne s’accorde pas assez de moments de pure contemplation.

Contemplation : regard ou considération assidue qui met en œuvre les sens (visuel, auditif) ou l’intelligence et concerne un objet souvent digne d’admiration.

On emploie souvent ce terme en précisant que le contemplateur est absorbé par la contemplation. Et c’est ce sentiment d’être absorbée, de se laisser absorber, qui m’a procuré un tel bien être pendant 10 jours. Comme lors de mes voyages à l’étranger, quand je me retrouve totalement absorbée devant une culture nouvelle, une architecture inédite, la musique d’une langue inconnue, des parfums surprenants…

En marchant dans la nature, au quotidien, j’ai ressenti cette acuité augmentée. Vous savez, lorsqu’on a l’impression d’avoir mille yeux, autant d’oreilles et de narines, et que toutes nos cellules se démultiplient pour absorber absolument tout de ce qui nous entoure…. J’ai développé une conscience de mes sensations plus accrue. Je faisais par exemple hyper attention à mes appuis, à la position de mon dos.

Donc voilà, pas de grande révélation, mais des millions de micro-moments imprimés dans ma mémoire !

 

Voyager solo

Je pratique le voyage solo depuis longtemps. Mais pas la marche en solitaire. Étonnamment, je ne me suis pas ennuyée toute seule (ou si peu), ce que je redoutais avant le départ. J’avais un peu peur de me retrouver en face à face avec moi-même, et que mon esprit soit brouillée par mille pensées à la seconde.

Finalement, j’ai eu l’impression ma tête se vidait plus qu’elle ne se remplissait. Il y a quelque chose d’hypnotique dans le rythme de la marche, très répétitif. Tout le corps se trouve pris par ce tempo, et le cerveau n’échappe pas à la règle. Mes pensées défilaient à la même vitesse que le paysage, c’est-à-dire paisiblement.

J’ai aimé, plus que je ne l’aurais pensé, les longs moments de solitude. Et également le fait de pouvoir avancer à mon rythme : accélérer, ralentir, traîner, faire des pauses, des détours (et brailler des chansons en toute impunité) selon les envies et l’état physique.

Et finalement, d’être seule tout au long de la journée m’a permis d’apprécier encore plus la compagnie du soir, lorsqu’elle s’est présentée, notamment chez les couchsurfers qui m’accueillaient le soir et dans les hébergements collectifs.

 

La préparation et l’équipement

Plusieurs personnes m’ont demandé quel type de préparation j’avais faite avant de me lancer d’entamer les 10 jours de marche. Réponse : quasiment aucune ! Je suis loin d’être une athlète : je me considère plutôt comme une sportive du dimanche. Je pointe le bout de mon nez à la salle de sport une ou deux fois par semaine, et souvent moins.

Après, je me déplace presque exclusivement à pied au quotidien, et je consacre de temps en temps mon dimanche à une longue marche (environ 4 heures). Ma préparation physique a donc consisté en un petit décrassage, lors d’étapes test, étapes qui m’ont autant servi à tester ma résistance à l’effort qu’à vérifier le confort de mon équipement.

Quant à l’équipement, il a été des plus minimalistes. Partir en voyage depuis le seuil de sa porte est une expérience extraordinaire, et le désencombrement de mon paquetage pour parvenir à ne conserver que l’essentiel a participé au sentiment de liberté évoqué plus haut. J’ai refait mon sac plusieurs fois avant de partir. C’était d’ailleurs la première fois que cela m’arrivait, étant plutôt du genre à balancer quelques fringues dans ma valise en mode punk.

Donc côté bagage, la liste de mes effets n’était pas très longue : une tenue short/T-shirt sur moi, une en rab, un legging et un sweet léger pour le soir, des sous-vêtements, une paire de chaussures de rando, une paire de running, une serviette microfibre, une gourde, un petit sac isotherme pour le casse-croûte, un fil à linge et deux mousquetons pour étendre ma petite lessive. Auxquels s’ajoutaient un téléphone et un appareil photo compact et leurs chargeurs respectifs, un carnet et deux stylos, et quelques plans des environs.

Pour l’hygiène, j’ai fait très light aussi : brosse à dent, dentifrice, crème solaire, échantillons de shampoing et savon de Marseille, plus des pansements et des compeeds.

maison flottante sur le canal du midi vers Marseillette

Au dernier moment, j’ai sacrifié des accessoires nécessaires mais encombrants (cape de pluie, regrettée lors des orages violents de l’étape 7), ce qui m’a permis de parvenir à un bagage de moins de 7 kilos.

Au niveau du choix du sac-à-dos, gros fail. J’avais opté pour un modèle léger, avec dos aéré, qui s’est révélé inconfortable, pas super stable, et m’a causé d’énormes ampoules sur les épaules (frottement des bretelles en matière synthétique, super abrasive). Je l’ai revendu immédiatement après.

 

Les hébergements

En raison d’un budget limité, il a fallu que je trouve des modes d’hébergements peu onéreux. Dans un premier temps, j’ai envisagé de faire du camping, et puis j’ai réalisé l’équipement qu’il me faudrait trimballer : je passais d’un sac de 6 kilos à à un sac de près de 15 kilos, sans compter le caractère encombrant de ce type de matériel (notamment les tentes légères mais pas super aérodynamiques, #balancetaqueschua).

le pont de pigasse et l'ancienne auberge d'étape sur le canal du midi

Grâce à l’intervention de mes coupaings, qui m’avaient préparé une tontine d’anniversaire avant mon départ, j’ai eu un peu plus de choix que prévu pour les logements, et un peu d’argent de poche pour la route !

J’ai lancé un appel sur le site Couchsurfing, des personnes ont répondu de manière positive, dont plusieurs, à ma grande surprise, à la campagne. Honnêtement, je n’avais jamais songé à utiliser le site pour trouver des hébergements hors des villes !

plaque de cocher écluse de Villedubert canal du midi

Ainsi, pour l’étape 4, qui s’achevait à Carcassonne, Hakim m’a offert son canapé le temps d’une nuit (ainsi qu’une super baignade au lac de la Cavayère, et des sardines grillées). Tout près de Homps, à la fin de l’étape 6, Martjin m’a accueillie chez lui, et nous avons bien refait le monde lors d’un diner à base de produits frais, de bière locale et de discussions sur la danse.

Dans un hameau tout près de Poilhes, j’ai rencontré Nadia et son mari, lors de l’étape 8. Malgré la fatigue des troupes, nous avons parlé exploration des pays de glace une bonne partie de la soirée.

Seul hic survenu au cours de ce petit périple, le couchsurfeur chez qui je devais dormir à Béziers m’a fait faux bond. Heureusement, il m’a prévenu suffisamment en avance pour que j’ai le temps de me retourner, même si cela m’a tracassé le long des étape 8 et 9. Finalement, à Béziers, ce sont des amis toulousains qui m’ont accueillie, à la toute dernière minute, comme je le raconte dans l’article de l’étape 9. Et enfin, à Agde, c’est moi qui ai annulé le couchsurfing, prise par une envie d’en découdre avec cette interminable randonnée, et de finir la marche avant la tombée de la nuit !

Il n’y a que peu de gîtes d’étape le long du canal, mais j’ai tout de même réussi à dégoter LE plus improbable d’entre tous : une nuit en tonneau (un foudre de vin) dans une ancienne cave viticole réaménagée, relatée dans les articles de l’étape 5 et de l’étape 6.

Enfin, à Ouveillan,j’ai tout même réussi à mettre la main sur une chambre en Airbnb (avec une terrasse tropézienne en bonus), chez Théodore, lors de l’étape 7.

 

Ressources documentaires

Le canal du Midi compte pas moins de 350 ouvrages d’art, dont 63 écluses, 126 ponts, 55 aqueducs, 7 canaux, 6 barrages et 1 tunnel. J’en ai croisé un certain nombre pendant cette marche, et raté un paquet, notamment ceux qui sont difficilement visibles depuis le chemin de halage.

Pour tout comprendre sur la construction du canal, le fonctionnement des ouvrages, et en savoir plus sur la vie d’avant, celle du halage, des barques de poste, du frêt, j’ai eu énormément recours au fonds Régional de la Bibliothèque du Patrimoine de Toulouse, particulièrement bien fourni.

port et pointe des onglous à Marseillan

Plusieurs sites m’ont permis de vérifier mes données, et notamment les emplacements de certains ouvrages hydrauliques, souvent mal recensés :

Le premier, le plus fourni, le plus travaillé, bref, LA référence : le canaldumidi.com


L’un de ses membres, Nicolas Dürr, a fait un super boulot photo que vous pourrez découvrir en consultant ses galeries Flickr par ici.


Pour l’histoire des ouvrages d’art, j’ai beaucoup consulté l’ancien site de la région Midi-Pyrénées, Patrimoine La Région, et ses fiches par lieu (uniquement en Midi-Pyrénées).

J’ai bien sûr passé un temps fou sur Google street / Earth, pour re-géolocaliser mes photos, après coup.


Les seuls ouvrages que je conseille de consulter avant le départ (ou d’embarquer avec vous) sont : Le canal du Midi : guide du randonneur, de Lauriane Clouteau (les éditions du Vieux Crayon, 2005 et 2008), qui détaille tout le trajet et l’état du chemin de halage, ainsi que les guides Fluviacartes du canal, qui permettent de bien visualiser le parcours de la voie d’eau, les ports, les sites d’intérêt et les points d’eau.

 

En conclusion

J’ai achevé cette marche avec la sensation d’avoir accompli quelque chose, même si la distance parcourue n’était pas totalement exceptionnelle. Partir en vacances dans sa région, depuis le seuil de sa porte, peut sembler à première vue manquer d’exotisme, mais l’expérience vaut le détour et si vous vous lancer dans cette micro-aventure, vous ne manquerez pas d’être surpris !

Deuxième accomplissement, celui de l’écriture, car ces 10 jours de marche ont engendré une série de 12 articles-reportages, au format long, qui m’ont permis partager avec vous ce périple un peu commun mais pas banal, vous en conviendrez.

Avant de clore ce chapitre « canal du Midi », je tenais à remercier toutes les personnes qui se sont impliquées dans ce voyage local, les copains et les hôtes d’un soir. Et puis je voulais aussi vous remercier pour votre fidélité, vos questions toutes très pertinentes, vos remarques motivantes, et également pour votre patience quand le rythme de production des articles était sur le déclin.

À très vite pour de nouvelles histoires de voyage !

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2 commentaires sur “Canal du Midi à pied : le bilan”

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